Les principaux changements introduits par le nouveau règlement européen sont liés à l’évolution de l’environnement commercial dû au développement de la vente automobile en ligne
Dans le cadre des accords de
distribution automobile aujourd'hui en vigueur, le
distributeur automobile indépendant (concessionnaire) achète les véhicules neufs du constructeur automobile pour les revendre à ses clients au prix qu'il détermine. Les accords de distribution automobile permettent le maillage territorial de la distribution automobile.
Le nouveau règlement européen d'exemption des accords de distribution automobile n°2022-720 a été publié au Journal Officiel de l'Union Européenne le 11 mai.
Le règlement européen donne le cadre régissant les relations entre constructeurs
automobiles et distributeurs automobiles pour la décennie à venir.
Le texte remplace, à compter du 1er juin, le règlement européen 330/2010, et sera applicable jusqu'au 31 mai 2034.
Le texte s'accompagne de
Lignes Directrices, qui fournissent des explications complémentaires sur l'interprétation de dispositions du règlement et sur son champ d'application.
Le texte réglementaire est l'aboutissement d'un processus de consultation ouvert par la Commission européenne en 2018.
Attendu par les acteurs de la filière automobile, le texte
encadre les accords entre les fournisseurs (constructeurs automobiles) et les distributeurs.
Le texte présente un certain nombre d'évolutions, portant d'une part sur les accords de distribution, et d'autre part sur les contrats d'agence ou de commission.
Les principaux changements introduits par le nouveau règlement européen sont liés à l'évolution de l'
environnement commercial dû au développement de la
vente automobile en ligne.
Trois évolutions nouvelles sont importantes pour la distribution automobile :
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Double distribution : Il s'agit de la situation dans laquelle le constructeur automobile vend ses produits par l'intermédiaire de distributeurs automobiles indépendants, mais aussi directement aux clients finaux, en concurrence avec ses distributeurs indépendants.
La Commission avait jusqu'à présent toujours exempté sans aucune limite ces ventes directes en considérant qu'elles n'avaient pas d'effet négatif sur la concurrence.
Concernant l'encadrement des échanges d'informations en cas de double distribution de la part du constructeur, la Commission dit avoir constaté que le développement des ventes directes posait des problèmes d'échanges d'informations entre entreprises concurrentes. Le Règlement prévoit une limitation des échanges d'informations entre constructeur automobile et distributeur automobile à celles qui sont directement liées à la mise en œuvre de l'accord vertical et nécessaires pour améliorer la production ou la distribution des biens ou services contractuels.
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Double prix : Le règlement européen permet la possibilité pour le constructeur automobile d'avoir un prix de gros différent selon que le produit soit vendu en magasin ou sur Internet. L'exemption du double prix est soumise à la double condition que la différenciation du prix de gros soit justifiée au regard du niveau des investissements requis pour vendre respectivement en ligne ou hors ligne, et que la différence de prix ne compromette pas la profitabilité ou la viabilité des ventes en ligne. Les Lignes Directrices précisent que ces critères ne doivent en aucun cas remettre en cause la liberté des distributeurs d'avoir leur propre site de vente en ligne et de faire de la publicité en ligne.
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Plateformes hybrides : Les fournisseurs de services d'intermédiation en ligne, qui vendent des biens ou des services en concurrence avec les entreprises auxquelles ils proposent leurs services d'intermédiation, ne bénéficient pas de l'exemption. La Note explicative du règlement précise que cette disposition est cohérente avec le Digital Market Act sur lequel la Commission, le Parlement Européen et les Etats Membres sont parvenus à un accord politique le 24 mars 2022, qui vise à encadrer l'activité des plateformes des GAFA, disposant d'un pouvoir de marché trop important pour bénéficier de l'exemption. Toutefois, le Règlement n'est pas limité aux plateformes des GAFA et peut également s'appliquer aux plateformes d'autres fournisseurs, tels que les constructeurs automobiles qui entendent constituer des « écosystèmes » autour de sites propres sur lesquels seront proposés des véhicules neufs, des véhicules d'
occasion, des financements et des services de mobilité. Pour organiser ces « écosystèmes », les constructeurs automobiles entendent s'appuyer sur les données personnelles des clients et des informations commerciales collectées par leur réseau.
Le nouveau règlement
maintient l'interdiction de l'imposition d'un prix de revente au détail par un fournisseur à ses distributeurs.
Un certain nombre de constructeurs automobiles envisagent de proposer des contrats d'agence ou de commission à l'avenir, au lieu des contrats de distribution sélective jusqu'à présent en usage pour la vente des véhicules neufs.
L'une des principales raisons qui poussent les constructeurs à vouloir recourir à de tels contrats est la volonté de maîtriser le prix de vente au détail des véhicules neufs pour pratiquer une politique de prix net, en mettant fin à la concurrence intramarque entre distributeurs et aux remises accordées aux clients.
Les contrats d'agence (facturation directe du client par le constructeur) ou de commission (facturation du client par le commissionnaire mais pour le compte et au prix indiqué par le constructeur) permettent d'échapper à l'interdiction du prix de revente au détail imposé, mais à la condition que l'agent ou le commissionnaire ne soit plus un intervenant indépendant assumant les risques de son activité, mais un « auxiliaire » du fournisseur/constructeur pour la commercialisation des véhicules neufs, ne supportant aucun « risque financier ou commercial » à ce titre.
Les Lignes Directrices apportent d'importantes précisions sur la nature des risques et les modalités de prise en charge des coûts financiers à assumer par les constructeurs automobiles dans le cadre des contrats d'agence ou de commission :
- Les lignes directrices définissent clairement la nature des risques à assumer ou compenser par le constructeur : non seulement des risques relatifs aux contrats de vente conclus pour le compte du fournisseur par l'agent ou le commissionnaire (financement des stocks, etc.), mais également tous les risques relatifs aux « investissements propres au marché », c'est-à-dire l'ensemble des investissements nécessaires à la commercialisation des véhicules neufs, et non pas seulement les investissements spécifiques à une marque.
Les constructeurs qui opteront pour ce type de contrat devront donc faire un comparatif entre les avantages qu'ils peuvent retirer de la maîtrise du prix de vente au détail de leurs véhicules, et les charges à assumer.
- Les lignes directrices définissent les modalités de prise en charge des coûts et risques financiers et commerciaux. Si les constructeurs peuvent utiliser différentes méthodes pour rembourser à un agent ou commissionnaire les coûts qui leur incombent, la méthode utilisée doit toujours distinguer clairement les montants destinés à couvrir ces coûts et les commissions dues à l'agent ou au commissionnaire en rémunération de ses services d'intermédiation.
- Les lignes directrices précisent l'utilisation d'un mode de distribution mixte : un constructeur qui opte pour un système de distribution en
achat /revente pour une partie des véhicules neufs de ses gammes, et pour un système d'agence ou de commission pour une autre partie, tous les investissements affectés aux véhicules neufs distribués en agence ou commission doivent être compensés par le constructeur, même s'ils ont été engagés par le distributeur, dès lors qu'ils ne sont pas amortis à la date de mise en place du système d'agence ou de commission.
Source : Mobilians (mouvement des chefs d'entreprises du commerce et de la
réparation automobile et des services de mobilité :
voitures, motos, vélos, véhicules industriels, trottinettes, etc.)
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